Scipion de Gramont, Au-delà du courtisan de Louis XIII, une approche originale des fonctions de la monnaie et du niveau général des prix
Laure Chantrel  1@  
1 : Centre de Recherches Interdisciplinaires en Sciences humaines et Sociales de Montpellier  (CRISES)  -  Site web
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Érudit libertin, ami de La Mothe Le Vayer et de Gabriel Naudé, grands noms de la Raison d'État et de l'absolutisme monarchique, Gramont écrit son Denier royal guidé par un objectif : démontrer que le pouvoir d'achat des ressources financières du Roi n'a pas augmenté depuis Charles V.

Si l'on veut abattre le lieu commun selon lequel impôts et taxes ne cesseraient d'augmenter et le peuple de s'appauvrir, il faut impérativement construire une théorie de la valeur permettant de définir le pouvoir d'achat du revenu des particuliers, des princes et de la nation. L'entreprise nécessite de distinguer rigoureusement augmentation des prix et cherté. Bodin, comme Malestroit, confondent la mesure de la richesse avec la richesse elle-même. C'est l'abondance ou la rareté des biens satisfaisant aux besoins des hommes qui permet de savoir si ces biens sont devenus plus chers, en aucun cas la quantité de métaux précieux qu'il faut céder en échange. Cela a-t-il un sens de dire que depuis trois cents ans, le royaume de France n'a cessé de s'appauvrir ? Voilà Bodin et Malestroit renvoyés tous deux « aux erreurs populaires » à cette propension des hommes à penser que tout va de plus en plus mal, que le temps se dégrade, que la pauvreté s'accroît, que les hommes sont de plus en plus mauvais, que les terres sont de moins en moins fertiles.

Le stock de métaux précieux circulant représente l'ensemble des richesses et l'ensemble des richesses représente à son tour non seulement les métaux précieux mais l'unité de compte. La distinction entre unité de compte et monnaie métallique n'a plus grande importance, seul compte le pouvoir d'achat des revenus.

Dans l'espace double de la représentation, le dernier mot reste malgré tout à l'or et à l'argent. L'arrivée d'or et d'argent d'Amérique a mis les richesses en mouvement, suscité des progrès dans l'industrie et permis l'accroissement de l'opulence du royaume. Et c'est de cette opulence que naissent la puissance et richesse des rois.

La critique radicale que Scipion de Gramont adresse à Bodin et Malestroict lui fournit une méthode qui l'amènera à répondre aux questions suivantes d'une façon tout à fait originale :

Comment convient-il de définir la richesse et la monnaie ? Quels rapports entretiennent-elles ?

Qu'en est-il de la cherté ? Est-elle réelle ou supposée ? Comment expliquer la diminution de la valeur estimative de la monnaie ? Quelle est la bonne méthode pour étudier les mouvements des prix et des revenus?

Comment les revenus du roi ont-ils évolué ? Quelles sont les causes du mécontentement du peuple ? Comment y remédier ?

 



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