Entre libéralisme et interventionnisme : Colson et la question des assurances sociales
Joachim De Paoli  1@  
1 : Triangle : action, discours, pensée politique et économique  (TRIANGLE)  -  Website
Institut d'Études Politiques [IEP] - Lyon, Université Lumière - Lyon II, CNRS : UMR5206, École Normale Supérieure [ENS] - Lyon, Université Jean Monnet - Saint-Etienne, École Normale Supérieure (ENS) - Lyon
15, parvis René-Descartes - BP 7000 69342 LYON CEDEX 07 -  France

La question des assurances sociales, y compris l'assurance concernant la vieillesse, est un problème récurrent en économie, que ce soit en théorie ou en pratique. La loi les rend progressivement obligatoires à partir de la loi de 1898 sur les accidents du travail jusqu'en 1930 avec la loi concernant entre autres l'assurance sur la maladie.

 

L'objet de cette communication est de rendre compte des débats qui ont eu lieu parmi les économistes libéraux français lors de la mise en place des lois rendant les assurances sociales obligatoires. L'analyse se focalisera sur les contributions d'un auteur peu étudié de nos jours mais qui a pourtant joué un rôle important à son époque : Clément Colson. En effet, ce dernier a eu un rôle marquant en tant qu'économiste, mais aussi en tant que fonctionnaire et homme politique. Sa vision des assurances sociales sera comparée à celle d'autres économistes libéraux de son époque représentant différents courants de l'Ecole libérale française : l'ultralibéral Guyot, le libéral modéré Leroy-Beaulieu, l'économiste leplaysien Cheysson et celui qui fut l'un des élèves les plus connus de Colson, à savoir Jacques Rueff.

 

L'analyse permettra de mettre en avant plusieurs points.

Tout d'abord, en étudiant le discours sur les assurances sociales de l'époque, il s'agira de montrer que les différents membres de l'Ecole libérale française ont des avis divergents. Ainsi, Guyot s'oppose à toute intervention de l'Etat et défend le système de la responsabilité civile, Leroy-Beaulieu est pour encourager l'assurance, vue comme une épargne collective, tout en se prononçant contre l'intervention de l'Etat. Cheysson défend une intervention de l'Etat pour permettre aux ouvriers d'être assurés et propose un « libéralisme d'Etat » où il concilie obligation d'assurance et liberté du choix d'assurance pour le patron. Il sera également montré que l'analyse des différents types d'assurances sociales n'est pas la même selon le risque auquel elles font face. Ainsi, alors que les assurances sociales les plus acceptées sont celles concernant les accidents et la maladie, tous les auteurs ne pensent pas que la retraite doive faire l'objet d'une assurance ; l'assurance chômage est rejetée parce que le risque n'est pas indépendant de l'assuré.

Ensuite, en exposant l'argumentation de Colson, il s'agira de mieux connaître la pensée de cet auteur qui est présenté par Bousquet et Divisia comme l'économiste français le plus important du premier quart du XXe siècle après Walras. Nous verrons que théorie et pratique sont très liées chez lui. Ainsi, les ouvriers n'ayant pas les ressources nécessaires pour pouvoir être prévoyants, l'Etat doit prendre en compte la question sociale et intervenir pour leur permettre d'être protégés contre les risques auxquels ils font face. En présentant sa vision des assurances sociales, nous verrons qu'il est possible de le ranger parmi les économistes libéraux accordant paradoxalement une place importante à l'Etat.

Enfin, le rôle déterminant qu'a pu avoir Colson sur la pensée de Rueff sera mis en avant en montrant que la théorie du chômage développée par Rueff est très inspirée par le développement de son maître sur l'assurance chômage.



Online user: 1